Traverser le pont
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Salut,
Comment vous traite ce début d’année ? Chez moi, il est synonyme de grands chambardements. Après avoir pris deux semaines de pause (bien méritées, si je puis me permettre) fin décembre, revenir à la vraie vie me semble presque insurmontable. Il y a des rendez-vous à prendre, de la compta à faire, un frigo à remplir, des annonces immo à regarder, des livres à écrire, des ateliers à préparer, des projets à penser, des factures à éditer... La liste a l’air interminable, elle l’est sûrement d’ailleurs, et plus je me penche sur elle, plus mon souffle se fait court. Est-ce que je vais réussir à tout faire ? Est-ce que cette vie, la “vraie”, celle des adultes fonctionnels, est compatible avec ma sensation constante d’être une grande enfant tombée de l’autre côté du miroir un peu trop tôt, sans avoir été armée pour tout ce qui allait se passer.
Depuis le 1er janvier, j’essaye de renouer avec une pratique quotidienne de la méditation. Je fais partie de ces personnes terriblement angoissées qui ont cru (parce qu’on leur avait dit) trouver le salut dans la pratique de la pleine conscience. J’ai donc essayé, pendant longtemps, de méditer dans le silence en laissant les pensées me traverser comme on regarde les voitures passer sur l’autoroute, bla bla bla mon cul sur la commode. Spoiler alert: ça m’a encore plus angoissée. Ça marchait bien quand j’allais bien, et quand j’allais mal, ça aggravait mon cas. Alors j’ai arrêté, en me sentant nulle et pas assez bonne méditante, et même pas capable de faire un truc aussi simple que rester assise à rien faire.(À ce sujet, il est intéressant de constater que la posture de yoga sukhasana, être assis·e en tailleur et qu’on traduit parfois par “posture facile” en français, n’est pas une posture facile : c’est censé être une posture confortable pour pouvoir rester immobile longtemps (= le temps de méditer), mais ça ne veut pas dire qu’il est effectivement facile de rester immobile longtemps.)
Suite à ma retraite de yoga avec Cécile, j’ai découvert que je ne m’y prenais pas de la meilleure manière pour méditer. Je sentais confusément que ça pouvait me faire du bien, mais pas du tout de la manière dont je m’y prenais habituellement : je méditais le soir, avant d’aller au lit, je faisais des méditations silencieuses, et je voyais donc tout le poids de ma journée ressurgir dans ma tête juste avant de fermer les yeux pour dormir. Insomnies, crises d’angoisse, échec. Avec Cécile, on commençait les journées par 20 minutes de méditation, qui se faisaient sous la forme d’un scan corporel. On observe ce qui se passe dans chaque partie du corps tour à tour, sans jugement. On a quelque chose à quoi se raccrocher, il n’est pas question de créer un immense vide dans la tête et de lutter pour qu’il ne se remplisse pas de pensées angoissantes.