Pourquoi j'ai arrêté les ateliers d'écriture
Et pourquoi je recommence.
Salut,
Hier, j’ai eu 31 ans. C’est bizarre, de vieillir : avant je passais six mois à attendre mon anniversaire, et le mois de décembre était mon préféré entre tous. Depuis quelques années, je peine à mobiliser de l’enthousiasme face à mes anniversaires, Noël m’agace dès qu’il dépasse la zone très circonscrite de ce qui émerveille ma fille, et alors comble de l’étrange, je n’aime plus les calendriers de l’Avent. Qu’est-ce qui m’arrive ? Dire qu’ado je pouvais manger une tablette entière de chocolat au lait devant le film à la télé, et que maintenant UN chocolat praliné me donne mal aux dents. Bref.
Ce n’est pas de ça que je voulais vous parler aujourd’hui. Je voulais dire que puisque prendre un an est l’occasion de faire des bilans, et que cette semaine d’anniversaire coïncidait aussi avec le seul atelier d’écriture que j’ai animé cette année, ça m’a donné envie de me pencher sur ce sujet.
Si j’en crois mon calendrier, j’ai commencé à donner des ateliers d’écriture en 2021. Je me souviens très bien de l'élément déclencheur : j’ai été contactée par Marion, qui avait un bookclub féministe associatif et qui me demandait si, par hasard, follement, j’aimerais animer des ateliers d’écriture via son association. Je me souviens aussi très bien que c’était pile le bon moment. J’avais en effet très envie de faire ça, mais je ne savais pas du tout comment m’y prendre car je ne l’avais jamais fait. Étrangement, je n’avais même jamais participé à un atelier d’écriture. Mais si Marion me le proposait, c’est qu’elle pensait que j’avais le droit de le faire.
Avec Marion, on a mené une saison entière d’ateliers et même un cycle d’accompagnement, avec les mêmes personnes sur plusieurs séances. Ça a été une expérience très riche pour moi : j’ai aimé penser les trames, tester les exercices, apprendre à écouter, à faire des retours. Le cadre proposé par Marion était l’équilibre parfait entre militantisme et self care, et ça m’a beaucoup inspirée. Quand j’ai pris une place dans un atelier d’artistes, j’avais en plus le luxe d’avoir un endroit d’où mener mes ateliers en ligne qui n’était pas ma maison. Et puis je suis tombée enceinte.
Je l’ai déjà dit, je n’ai pas aimé être enceinte. J’ai été très fatiguée, ça a commencé à devenir pénible pour moi de soutenir mon attention pendant deux heures, j’ai été parfois trop malade et j’ai dû annuler ou décaler plusieurs ateliers. Ma confiance en moi en tant qu’animatrice a commencé à vaciller. Les ateliers ont pris une pause le temps que j’accouche, que j’écrive un roman, le publie, m’en remette. Puis j’ai proposé à Marion de reprendre les ateliers ensemble. J’ai préparé un an de thématiques, j’ai bricolé un site internet, un plan de com.
J’avais oublié de me demander si j’avais toujours le feu.
De février à juillet 2023, j’ai animé 9 ateliers d’écriture et je n’ai pas retrouvé le feu. Il se passait un truc très bizarre : j’aimais réfléchir aux exercices, j’aimais rencontrer les participantes, les écouter, les guider. Mais les 2 jours avant et les deux jours après chaque atelier, je me traînais comme une limace. Je n’avais pas envie de passer 2h devant mon ordi, même si c’était pour aider des gens à déployer leur écriture (ce qui est ma véritable passion dans la vie, qu’on soit bien claires). Et je ressortais de chaque atelier très fatiguée.
En fait, j’étais juste fatiguée. Pour me rendre disponible à un maximum de personnes, j’animais ces ateliers le soir en semaine, et le samedi matin. Je gardais ma fille de 5 mois à mi-temps, et j’ai mis des mois à comprendre que même si animer des ateliers n’a rien de comparable avec, genre, travailler à la mine, ces temps de soirée et de week-end me manquaient, parce que j’avais très peu de temps libre. (= de temps où je n’étais pas, soit en train de travailler, soit en train de m’occuper solo de mon bébé)
Et comme j’étais fatiguée, je ne me sentais pas vraiment au top de mes capacités d’écoute active. Je me sentais vulnérable, pas vraiment légitime. Je voyais de plus en plus de femmes se lancer dans l’animation d’ateliers d’écriture et je me disais : qu’est-ce que j’ai à apporter de plus ?1 Est-ce que je vais vraiment prendre les sous durement gagnés de toutes ces honnêtes personnes, dans cette économie sans pitié, sans être certaine que ça les vaut ?
Je n’ai plus animé d’ateliers d’écriture pendant 1 an et demi... sauf quand c’était pour la bonne cause. Lire : sauf quand c’était sûr et certain que je n’allais pas gagner un centime ce faisant. J’ai créé des ateliers pour les crowdfundings de la librairie Un livre et une tasse de thé en 2023 et des éditions Daronnes en 2024, pour mon groupe d’écriture lors de notre résidence en mars, et donc cette semaine, pour récolter de l’argent en soutien à une famille gazaouie. Chaque atelier bénévole m’a fait raffiner ma pratique, m’a challengée dans ma posture d’animatrice, m’a reposé la question, régulièrement :
Suis-je prête à reprendre l’animation d’ateliers d’écriture en tant qu’activité professionnelle ?
En septembre 2023, c’était non : c’était le dernier atelier que je donnerais avant un moment.2 En juin 2024, c’était toujours non. J’étais encore fatiguée. En mars 2025, ah, pourquoi pas — mais est-ce que ça comptait, puisque mon groupe d’écriture n’est composé que de gens formidables et que tandis que j’animais mon atelier sur la romance, un crumble dorait au four ?
En décembre 2025, après l’atelier de mardi, assise au plus joli bureau prêté par une chère amie, la réponse est enfin : oui.

Je reprendrai l’animation d’ateliers d’écriture en 2026.
Enfin j’ai du temps et des idées, enfin je me sens pleinement m’appartenir, enfin je sais ce que j’ai à proposer.3 Bref, j’ai de nouveau le feu.
Je le ferai de la manière dont j’ai appris qu’elle me plaisait le plus : sans m’astreindre à une quelconque régularité, chaque atelier pensé avec amour comme une surprise. Je continuerai à en profiter pour faire circuler des textes qui m’ont transformée, et à faire la part belle à l’écoute active, à l’apprentissage communautaire du retour constructif. Ils auront toujours lieu en mixité choisie (sans homme cis) quand ils seront en ligne. Et j’espère vous proposer des ateliers dans la vie palpable4 aussi, parce que se voir en vrai c’est chouette aussi.
Maintenant que c’est annoncé, ça va forcément se réaliser.
Pour être tenu·e au courant des dates en avant-première, sans devoir slalomer entre les pièges algorithmiques d’Insta : mettez à jour vos préférences de newsletter en cliquant sur ce lien) et en cochant la case « Je veux aussi recevoir les dates des prochains ateliers d'écriture ». Je me réjouis de vous retrouver pour écrire ensemble et nous écouter.
Retrouvez toutes les informations à propos des ateliers sur mon site.
Une bonne nouvelle n’arrive jamais seule et comme c’est mon anniversaire, il y a 13% de réduction sur les abonnements à la newsletter Premium avec le code BONANNIVPAULINE. Rappel que la newsletter Premium, c’est 4 mails par mois, dont les chapitres de mon essai sur le post-partum, Une catastrophe naturelle. Et c’est peut-être de futures réductions sur les prix des futurs ateliers d’écriture... (oui, ce sera le cas)
(Le code est à utiliser avant le 14 décembre au soir et la réduction sera appliquée pendant 1 an.)
Je vous dis à l’année prochaine à bientôt.
En attendant, cultivons nos voix.
— Pauline
PS : Depuis les tous premiers ateliers d’écriture, Marion est devenue mon amie et un de mes refuges, et c’est la chose la plus chouette qui peut arriver quand on prend des risques.
Et aussi : pourquoi j’ai une passion « m’insérer sur des marchés en voie de saturation » ? Rappel que j’ai décroché mon diplôme de communication pile quand Community Manager a cessé d’être un métier demandé. ↩
Je relis cette chronologie et, en parallèle de mon travail sur mon post-partum, je réalise que cette reprise, c’était tout simplement me précipiter pour reprendre une vie « normale » sans me demander où j’en étais, ce dont j’avais besoin désormais. ↩
On en reparlera en janvier (gros dossier à venir), mais il me semble de plus en plus urgent d’utiliser mon énergie et mes connaissances pour encourager la créativité et le simple fait de faire. Multiplions les radeaux face à la tempête qui voudrait que nous baissions les bras, nous tournions les pouces, et laissions les machines de milliardaires faire à notre place. Les machines ne savent pas rêver, imaginer, aimer. ↩
Selon une expression de mon amie Nathalie Sejean, que je vais réutiliser souvent. ↩
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