Meditatio in ego
De la lutte pour aimer des manuscrits imparfaits en toute humilité.
Salut,
Ainsi donc il faut retourner travailler ? Quelle cruelle injustice. Je ne sais pas dans quelle mesure il est possible d’être en forme début janvier, quand on a pris les fêtes à cœur et qu’on a un enfant qui se réveille de nouveau toutes les nuits. Moi, en tout cas, je suis crevée et j’ai du mal à garder les yeux ouverts.
J’ai quasiment terminé la traduction de Courir le risque, enfin son premier jet : j’ai été très rapide et je me connais, une ou deux repasses vont être nécessaires avant que je pense ce texte aussi bon en anglais qu’en français. Et c’est une affaire fluctuante, en traduisant je repère des tournures de phrases malheureuses, des répétitions, des choses que j’aurais mieux dites avec une quatrième repasse sur le texte en français. J’ai levé un peu le pied parce que j’étais en train d’être moins amoureuse de ce manuscrit qu’au départ, et je n’ai pas envie de ça envers mon travail en ce moment.
J’aimerais dire que j’aime tous mes livres d’un amour pur, égal et constant, mais ça aussi, c’est une affaire fluctuante. J’ai souvent beaucoup d’amour pour mes manuscrits quand je suis en train d’écrire le premier jet, puis le sentiment se transforme. Je pense qu’il me faut aimer un peu moins mon texte pour accepter qu’il est perfectible, ce qui est absolument crucial pour faire un bon travail d’édition, en bonne intelligence avec l’éditrice. Rester campée dans une posture de dévouement absolu au premier jet me rend incapable d’entendre des retours, je suis une première de la classe terrorisée qu’un commentaire de la prof dans la marge veuille dire que toute ma copie est nulle à chier. Dans le dévouement absolu il n’y a pas de place pour la nuance.