Les sanglots longs
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Salut,
Est-ce que parfois, vous avez l'impression d'être un désert aride ?
Ça fait un peu plus d'un an que je prends des antidépresseurs. Venlafaxine, 37,5 mg, parfois 75 si vraiment c'est la merde. C'est le plus faible dosage, ce n'est pas grand chose, c'est suffisant pour moi : tant mieux. Je n'avais jamais souscris à l'idée psychophobe que l'antidépresseur est un échec, une faiblesse — une idée paradoxale en France, où sont prescrits tant d'AD et d'anxiolytiques.1 Quand mon médecin m'a proposé de commencer ce traitement, je n'ai pas hésité, je n'ai pas eu peur, je savais que j'en avais besoin. Grâce à cette petite molécule qui inhibe la recapture de la sérotonine, je suis à peu près fonctionnelle et surtout, toujours en vie.
Si parfois je suis agacée d'ingérer quotidiennement plusieurs médicaments (après la pilule, l'AD, puis l'anti-migraineux), je sens bien qu'il me faut ça pour avoir le goût d'exister.2 À chaque fois que je passe chercher mes renouvellements à la pharmacie et que je ne paye rien, je me dis que la France est certes sur une pente fascisante bien raide, mais au moins je peux soigner mes troubles psychologiques et physiques sans m'endetter. Je me rappelle aussi que malgré tous les discours républicains sur la Sécu, son accès n'est pas garanti pour tout le monde. Moi-même, bardée de privilèges, j'ai passé plusieurs années sans Sécu à cause de problèmes administratifs, puis sans mutuelle par pauvreté, et quand j'ai avorté, j'ai découvert que la phrase "100% pris en charge par l'Assurance Maladie" n'est pas tout à fait vraie.3